histoire et tradition

Publié le 21 Juin 2024

 

Nous trouvons en Chine de nombreuses  appellations afin de désigner les méthodes de méditation, parmi elles nous trouvons Zuo Wang, après quelques précisions sur le sens et l’étymologie de ces deux termes, nous ajouterons ce que les textes classiques de la métaphysique chinoise ont pu décrire sur ce sujet, en la personne de Zhuang zi (1).

 

 

 

     Zuo

 

S’asseoir, être assis, être assis sur, être agenouillé assis sur ces talons

(Ricci 5155) 

2 personnes

 

sur la terre 

 

(Wieger 27) 

       

 

 

Wang

 

Oublier, omettre, négliger

 

Zuo wang (Tao) faire le vide l’esprit

(Ricci 5470)

 

Wang

Se cacher

Wieger 10

Ru

Entrer pénétrer, entrer dans une cachette

Exprime la pénétration des racines d’une plante dans le sol ligne verticale la tige, lignes descendantes racines

Wieger 15

 

Yin

 

Courbe, couvrir, cacher

Wieger 10

Xin

Figure du cœur

Wieger 107 A

           

 

Quelques extraits tirés du Zhuang Zi (2)  qui se rapporte à l’oubli de soi que nous laissons à votre réflexion

 

 

S’unir à celui qui pénètre tout

 

Zhuang Zi 6.J. Yen-Hoei

 

Yen-Hoei le disciple chéri, dit à son maître Confucius (3) :

— J’avance...

— Comment le sais‑tu ? demanda Confucius...

— Je perds, dit Yen-Hoei, la notion de la bonté et de l’équité...

— C’est bien, dit Confucius, mais ce n’est pas tout.

Une autre fois, Yen-Hoei dit à Confucius :

— Je profite...

— A quoi le reconnais-tu ? demanda Confucius...

— J’oublie les rites et la musique, dit Yen-Hoei...

— C’est bien, dit Confucius, mais ce n’est pas tout.

Une autre fois, Yen-Hoei dit à Confucius :

— Je progresse...

— Quel signe en as‑tu ? demanda Confucius...

— Maintenant, dit Yen-Hoei, quand je m’assieds pour méditer, j’oublie absolument tout.

Très ému, Confucius demanda :

— Qu’est‑ce à dire ?

Yen-Hoei répondit :

— Dépouillant mon corps, oblitérant mon intelligence, quittant toute forme, chassant toute science, je m’unis à celui qui pénètre tout. Voilà ce que j’entends par m’asseoir et oublier tout.

Confucius dit :

— C’est là l’union, dans laquelle le désir cesse ; c’est là la transformation, dans laquelle l’individualité se perd. Tu as atteint la vraie sagesse. Sois mon maître désormais !

 

 

Laissez tomber le corps comme un habit !

 

Zhuang Zi 11.D. Le politicien Yunn‑tsiang,

 

— Etre céleste, fit Yunn‑tsiang, j’ai eu beaucoup de peine à vous trouver ; de grâce, veuillez m’instruire.

De fait, dit Houng‑mong, vous avez grand besoin d’appren­dre. Ecoutez donc !.. Commencez par n’intervenir en rien, et tout suivra naturellement son cours. Dépouillez votre personnalité (litt. laissez tomber votre corps comme un habit), renoncez à l’usage de vos sens, oubliez les relations et les contingences, noyez‑vous dans le grand ensemble, défaites­-vous de votre volonté et de votre intelligence, annihilez‑vous par l’abstraction jusqu’à n’avoir plus d’âme. A quoi bon spéculer, l’inconscience étant la loi universelle ? La foule des êtres retourne inconsciente à son origine. Celui qui aura passé sa vie dans l’inconscience, aura suivi sa nature. S’il acquiert des connaissances, il aura vicié sa nature. Car il est né spontanément, sans qu’on lui ait demandé qui et quoi il voulait être. Et la nature veut qu’il s’en retourne de même, sans avoir su ni qui ni quoi.

— Ah ! s’écria Yunn‑tsiang, être céleste, vous m’avez illuminé, transformé. Durant toute ma vie, j’avais cherché vainement la solution du problème, et voici que je la tiens...

Cela dit, Yunn‑tsiang se prosterna le front en terre, puis se releva et reprit son chemin.

 

 

Un avec le Ciel, se fondre dans le Cosmos

 

Zhuang Zi 12.I Confucius demanda à Lao-tan (4) 

— Certains s’appliquent à tout identifier, et prétendent que, licite et illicite, oui et non, sont une même chose. D’autres s’appliquent à tout distinguer, et déclarent que la non‑identité de la subs­tance et des accidents est évidente. Sont‑ce là des Sages ?

— Ce sont, répon­dit Lao-tan, des hommes qui se fatiguent sans profit pour eux‑mêmes, comme les satellites des fonctionnaires, les chiens des chasseurs, les singes des bateleurs. K’iou  je vais te dire une vérité, que tu ne pourras ni comprendre, ni même répéter proprement. Des Sages, il n’y en a plus ! Maintenant, nombreux sont les hommes, qui, ayant une tête et des pieds, n’ont ni esprit ni oreilles. Mais tu chercheras en vain ceux qui, dans leur corps matériel, ont conservé intacte leur part du principe originel. Ceux‑là (les Sages, quand il y en a,) n’agissent ni ne se reposent, ne vivent ni ne meurent, ne s’élèvent ni ne s’abaissent, par aucun effort positif, mais se laissent aller au fil de l’évolu­tion universelle. Faire cela (et par conséquent devenir un vrai Sage taoïste,) est au pouvoir de tout homme. Il ne faut, pour devenir un Sage, qu’oublier les êtres (individuels), oublier le Ciel (les causes), s’oublier soi‑même (ses intérêts). Par cet oubli universel, l’homme devient un avec le Ciel, se fond dans le Cosmos.

 

Le premier pas dans la voie de la sagesse

 

Zhuang Zi 12.K Tzeu-koung

Tzeu-koung disciple de Confucius, étant allé dans la principauté de Tch’ou, revenait vers celle de Tsinn. Près de la rivière Han, il vit un hom­me occupé à arroser son potager. Il emplissait au puits une cruche, qu’il vi­dait ensuite dans les rigoles de ses plates-bandes ; labeur pénible et mince ré­sultat.

— Ne savez‑vous pas, lui dit Tzeu-koung, qu’il existe une machine, avec laquelle cent plates-bandes sont arrosées en un jour facilement et sans fatigue ?

— Comment est‑ce fait ? demanda l’homme.

— C’est, dit Tzeu-koung, une cuiller à rigole qui bascule. Elle puise l’eau d’un côté, puis la déverse de l’autre.

— Trop beau pour être bon, dit le jardinier mécontent. J’ai ap­pris de mon maître, que toute machine recèle une formule, un artifice. Or les formules et les artifices détruisent l’ingénuité native, troublent les esprits vitaux, empêchent le Principe de résider en paix dans le cœur. Je ne veux pas de votre cuiller à bascule.

Interdit, Tzeu-koung baissa la tête et ne répliqua pas. A son tour, le jardinier lui demanda :

— Qui êtes‑vous ?

— Un disciple de Confucius, dit Tzeu-koung.

— Ah ! dit le jardinier, un de ces pédants qui se croient supérieurs au vulgaire, et qui cherchent à se rendre intéressants en chantant des complaintes sur le mauvais état de l’empire. Allons ! Oubliez votre esprit, oubliez votre corps, et vous aurez fait le premier pas dans la voie de la sagesse. Que si vous êtes incapable de vous amender vous‑même, de quel droit prétendez‑vous amender l’empire ? Maintenant allez‑vous‑en ! Vous m’avez fait perdre assez de temps !

Tzeu-koung s’en alla, pâle d’émotion. Il ne se remit, qu’après avoir fait trente stades. Alors les disciples qui l’accompagnaient lui demandèrent :

— Qu’est‑ce que cet hom­me, qui vous a ainsi troublé ?

— Ah ! dit Tzeu-koung, jusqu’ici je croyais qu’il n’y avait dans l’empire qu’un seul homme digne de ce nom, mon maître Confucius. C’est que je ne connaissais pas celui‑là. Je lui ai expliqué la théorie confucéiste, de la tendance au but, par le moyen le plus com­mode, avec le moindre effort. Je prenais cela pour la formule de la sagesse. Or il m’a réfuté et m’a donné à entendre, que la sagesse consiste dans l’intégra­tion des esprits vitaux, la conservation de la nature, l’union au Principe. Ces vrais Sages ne différent pas du commun extérieurement ; intérieurement leur trait distinctif est l’absence de but, laisser s’écouler la vie sans vouloir sa­voir vers où elle coule. Tout effort, toute tendance, tout art, est pour eux l’effet d’un oubli de ce que l’homme doit être. Selon eux, l’homme vrai ne se meut, que sous l’impulsion de son instinct naturel. Il méprise également l’éloge et le blâme, qui ne lui profitent ni ne lui nuisent. Voilà la sagesse stable, tandis que moi je suis ballotté par les vents et les flots.

Quand il fut revenu dans la principauté de Lou, Tzeu-koung converti au Taoïsme raconta son aventure à Confucius. Celui‑ci dit :

— Cet homme prétend pratiquer ce qui fut la sagesse de l’âge primordial. Il s’en tient au principe, à la for­mule, affectant d’ignorer les applications et les modifications. Certes, si dans le monde actuel il y avait encore moyen de vivre sans penser et sans agir, uniquement attentif au bien‑être de sa personne, il y aurait lieu de l’admirer. Mais nous sommes nés, toi et moi, dans un siècle d’intrigues et de luttes, où la sagesse de l’âge primordial ne vaut plus qu’on l’étudie, car elle n’a plus d’applications.

 

Éteindre les désirs de son cœur

 

Zhuang Zi 20.B Hioung‑ileao

 

L’incorruptible Hioung‑ileao ayant visité le marquis de Lou, remarqua qu’il était triste et lui en demanda la raison.

— C’est que, dit le marquis, alors que j’ai étudié les règles des anciens et cherché à faire honneur à mes prédécesseurs ; alors que j’ai vénéré les Mânes et honoré les Sages, personnellement et constamment, je suis affligé, coup sur coup, par toute sorte de malheurs.

— Cela ne m’étonne pas, dit I-leao. Les moyens que vous avec employés, ne vous préserveront pas. Songez au renard, au léopard. Ces animaux ont beau se retirer dans les profondeurs des forêts et les cavernes des montagnes, ne sortant que la nuit et avec beaucoup de précautions, endurant la faim et la soif plutôt que de s’aventurer dans les lieux habités ; ils finissent toujours par périr dans un filet ou dans un piège. Pourquoi ? A cause de leur belle fourrure, que les hommes convoitent. Or vous, Altesse, le Marquisat de Lou, c’est votre fourrure à vous, que vos voisins convoitent. Si vous voulez trouver la paix, dépouillez‑vous‑en bénévolement, éteignez tous les désirs de votre cœur, retirez‑vous dans la solitude. Dans le pays de Nan-ue, il y a une ville, dite Siège de la solide vertu. Ses habitants sont ignorants et frustes, sans intérêts propres et sans désirs. Ils produisent, mais ne thésaurisent pas ; ils donnent, sans exiger qu’on leur rende. Chez eux, ni étiquette, ni cérémonies. Cependant, malgré leur air de sauvages, ils pratiquent les grandes lois naturelles, fêtent les naissances et pleurent les décès. Marquis, quittez votre marquisat, renoncez à la vie vulgaire ; allons vivre ensemble là‑bas !

— C’est loin ! fit le marquis ; la route est difficile ; il y a des monts et des fleuves à passer ; je n’ai ni bateau ni char.

I-leao dit :

— Si vous étiez détaché de vos dignités, si vous ne teniez pas à votre pays, si vous désiriez aller là‑bas, votre désir vous y transporterait.

— C’est loin ! fit le marquis. Et les provisions ? Et les compagnons ?

I-leao dit :

— Si vous ne teniez pas à votre luxe, si vous n’étiez pas attaché à votre bien‑être, vous ne vous préoccuperiez pas des provisions ; vous vous confieriez aux fleuves, à la mer, ne craignant même pas de perdre la terre de vue ; et l’abandon de vos compagnons ne vous ferait pas reculer. Mais je vois bien, maître de vos sujets, que vos sujets sont vos maîtres, car vous tenez à eux. Vous n’êtes pas un Yao, qui ne considéra jamais personne comme son sujet, et ne fut jamais le sujet de personne. J’ai tenté de vous guérir de votre mélancolie ; mais vous n’êtes pas homme à employer l’unique remède efficace, lequel consiste, après avoir tout abandonné, à s’unir au Principe, dans l’abstraction Cette abstraction doit aller jusqu’à l’oubli de sa personnalité. Car tant qu’on garde la notion de sa personnalité, ses conflits avec celles d’autrui, empêcheront la paix. Soit un bac traversant un fleuve. Si une barque vide qui dérive, vient à le heurter, fussent‑ils irascibles, les mariniers du bac ne se fâcheront pas, parce qu’aucune personne n’est entrée en conflit avec eux, la barque étant vide. Si, au contraire, il y a une personne dans la barque, des cris et des injures partiront aussitôt du bac. Pourquoi ? Parce qu’il y a eu confit de personnes... Un homme qui aura su se dépouiller même de sa personnalité, pourra parcourir le monde entier sans éprouver de confit.

 

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[1] Zhuangzi ou Tchouang Tseu grande figure du taoïsme qui vécut de 370 à 300 av. J.C.
[2] Le Zhuang zi fait référence au texte attribué à ce philosophe
[3] Confucius ou Kong zi en pinyin (Maître Kong)  vécut de l’an 551 à l’an 479 avant Jésus-Christ
[4] Lao-Tan ou Laozi ou Lao-Tseu vécut de  570 à  490 av. J.-C.

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Source photos :

Guettyimages

Pixabay

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Publié le 8 Janvier 2024

L’énergétique chinoise nous éclaire sur la place précise et unique attribuée à chaque viscère sous la forme d’un mandat et d’une fonction dans le fonctionnement et l’organisation du corps, nous laissons à votre réflexion le tableau ci-dessous, pour plus de détail reportez-vous à l’excellent ouvrage de Dr J.M. Eyssalet « Montées des nuages descente des pluies »  p233-292.

IDEOGRAMMES

PINYIN

ORGANES/VISCERES

MANDATS

FONCTIONS

XIN

CŒUR 

PRINCE MAÎTRE

clarté-lumière de Shen

FEI

POUMON 

PREMIER MINISTRE

gouvernement mensurateur

GAN

FOIE 

GENERAL EN CHEF

programmation  prévoyance réflexion

DAN

VESICULE BILIAIRE 

RECTITUDE CENTRALE

décision  jugement tranchant

pouvoir exécutif

 

SHAN ZHONG

MILIEU DE LA POITRINE, M.C.

SECRETAIRE-MINISTRE AMBASSADEUR

joies – plaisirs rythme plénitude

PI

WEI

RATE

ESTOMAC

GRENIERS  SILOS ENTREPÔTS

Les cinq saveurs sortent de là

大腸

DA CHANG

GROS INTESTIN

VOIES DE DISPERSION ET DE TRANSMISSION  EVACUATION

Transformations métamorphoses

小腸

 

XIAO CHANG

INTESTIN GRÊLE

RECEVOIR EN ABONDANCE CONTENIR TRANSMETTRE

Métamorphoses des choses, des substances, des êtres, de la personne

 

SHEN

REINS

IMPULSER LA PUISSANCE DONNER LA FORCE

Techniques habilités savoir-faire évolution humaine et des espèces

三焦

 

SAN JIAO

TRIPLE RECHAUFFEUR

CREUSER LES VOIES D’EAU – DECIDER CONTRÔLER

Les voies d’eau en sortent

膀胱

 

PANG GUANG

VESSIE

CAPITALE DU DISTRICT ADMINISTRATION DES REGIONS

Métamorphose du souffle conservation des liquides organiques

A LIRE

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Nous vous conseillons également la lecture de cet autre ouvrage du DR J.M. Eyssalet consacré à la théorie des cinq éléments complet et passionnant.

 

 

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A lire également sur ce blog ci-dessous le rôle des organes selon Shizuto Masunaga

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Rédigé par Thierry Lambert

Publié dans #Energetique, #Histoire et tradition

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Publié le 17 Août 2023

La médecine chinoise puisse ses racines dans les temps antiques, rien ne vient attester de l'existence réelle des inventeurs de la médecine chinoise, ceci relève des mythes de la Chine ancienne. La création ou la découverte des trigrammes, l'utilisation des plantes comme remèdes et l'utilisation des poinçons de pierre pour agir sur les points d'énergie ont été attribuées à trois personnages légendaires des temps mythiques.

 

 

 

 

 

 

 

 

FU XI ; LE PREMIER DES TROIS AUGUSTES

Fu Xi serait à l'origine de la chasse, de la pêche, de la cuisson des aliments, de l'élevage, des constructions des maisons, du calendrier, de l'utilisation des métaux, des cordes nouées et des trigrammes. Au sujet de l''invention de ces trigrammes, deux thèses différentes semblent s'opposer, la tradition raconte que Fu Xi reçut du ciel par l'intermédiaire d'un cheval-dragon un tableau qui lui permit de créer les trigrammes. La deuxième provient du Yi Jing ; dans le grand commentaire (Da Zhuan) est exposé l'histoire de la civilisation chinoise en rapport avec les hexagrammes du Yi Jing dans laquelle Fu Xi fait figure de fondateur de la nation chinoise où son sens d'observation et son esprit pénétrant s'unissent pour mettre en forme les trigrammes.

 

L'INFLUENCE DU CIEL ; LE TABLEAU DU FLEUVE

Fu Xi aurait reçu d'un cheval dragon le He Tu (le tableau du fleuve), symboliquement l'apparition d'un dragon annonce une bonne nouvelle ou un changement très bénéfique.

L'étymologie de l'idéogramme Tu nous indique ceci (Wieger76 F) : Les combinaisons qu'il faut faire dans sa tête pour arranger son grenier quand on a plus de grains qu'on ne peut en loger. Sens étendu ; Méditer Combiner Projeter Plan calcul

L'idéogramme Tu n'a pas seulement le sens de plan ou de tableau mais aussi celui de réfléchir, de combiner, ou de créer quelque chose avec l’esprit. Nous verrons plus loin que la contemplation du diagramme du He Tu a inspiré à Fu Xi la création des trigrammes, la combinaison des traits pleins et discontinus. Tout n'a pas été donné par le ciel, l'influence céleste a sans conteste favorisé une création humaine en offrant le tableau du fleuve au fondateur de la nation chinoise mais celui-ci a su à partir des données du ciel créer un système de classification à partir des nombres, du ciel, et de la terre.

Philastre voyait dans ce cheval dragon le symbole du lever du soleil (le dragon) son coucher (le cheval) dans les figures du tableau (les points ronds noirs ou blancs) des astres et constellations et dans les trigrammes les phases de la lune. Pour lui la base fondamentale du Yi Jing est une observation astronomique !

 

 

Voici à quoi ressemble le tableau tel que les néo-confucianistes l'ont présenté sous la dynastie des Song (960-1279) Ce tableau était composé de figures ; points ronds blancs ou noirs groupés dans un certain ordre.

C'est l'origine des cinq éléments à partir des nombres pairs et impairs :

L'eau au nord naît du 1 du ciel qui s'associe au 6 de la terre
Le feu au sud naît du 2 de la terre qui s'associe au 7 du ciel
Le bois à l'est naît du 3 du ciel qui s'associe au 8 de la terre
Le métal à l'ouest naît du 4 de la terre qui s'associe au 9 du ciel
La terre naît du 5 du ciel qui s'associe au 10 de la terre

Ce tableau est l'association de deux systèmes de pensée, l'un issu du Yue Ling (traité sur le calendrier) qui indique l'emplacement que le fils du ciel (l'empereur) doit occuper quand il édicte les ordonnances mensuelles sur l'emplacement du Ming Tang (bâtiment à cinq salles disposées en croix) ceci en suivant les saisons ; les nombres étant associés aux saisons. L'autre système est issu du Hong Fan qui associe les nombres aux éléments ; eau, bois, feu, terre, métal.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LA CREATION DES TRIGRAMMES ; FU XI OBSERVE ET CREE

Alors que dans les temps anciens Fu Xi gouvernait le monde,
 il leva les yeux et contempla les images issues du ciel,
 il abaissa les yeux et contempla les phénomènes de la terre.
 Il contempla les signes des oiseaux et des animaux
 et constata leur adaptation aux régions. Il procéda
 directement à partir de lui-même et indirectement
 à partir des choses. Il inventa ainsi les huit trigrammes
 pour entrer en connexion avec les vertus
 des dieux lumineux et classer les conditions
 de tous les êtres. (Le grand commentaire
, chapitre II histoire de la civilisation §1)

Ici point de révélation par un animal messager du ciel (un dragon ou une licorne), Fu Xi observe, s'imprègne des choses au-dessus de lui, en dessous, en lui et autour de lui. Ces observations le pousse à inventer les trigrammes donnant aux humains la possibilité de communiquer avec le ciel.





Il fit des cordelettes nouées et les utilisa 
comme filets et comme nasses
 pour la chasse et la pêche.
 Il tire probablement cette invention
 de l'hexagramme CE QUI S'ATTACHE
 (le grand commentaire chapitre II
 histoire de la civilisation §2)

 

 

Image de l'hexagramme n°30 Li

 

Le dessin formé par l’hexagramme aurait suggéré à Fu Xi l'invention des cordelettes nouées, donc de la chasse et de la pêche (l'hexagramme qui est partagé à l'intérieur et fermé à l'extérieur est l'image des mailles d'un filet dans lequel les animaux restent attachés)

 

IMAGE ET YIN YANG

L'origine des trigrammes provient du Taiji, celui-ci laisse apparaître plusieurs images ; la poutre faîtière, et le clair et le sombre.

La poutre faîtière

 

Ji est originellement une poutre faîtière


 

Il s'agit d'un simple trait

A partir cette unité, la dualité apparaît à travers les opposés tels que le haut et le bas, la droite et la gauche, le devant et le derrière. Ces opposés sont devenus ensuite le yin et le yang.

Le clair et le sombre

Le yin yang exprime aussi l'image de deux vallées, l'une exposée au Sud correspond au clair, l'autre exposée au Nord correspond au sombre. Ces images donneront naissance au diagramme du yin yang. Notons qu'ici aussi, nous trouvons une rivière qui délimite les deux vallées, certainement le fleuve jaune qui a vu naître la nation chinoise.

LES TRIGRAMMES

Le grand premier commencement (Tai Ji)

 

engendre les deux puissances fondamentales (Yi) :

 

le yin (l'obscur)

 

le yang (le lumineux)

Les deux puissances fondamentales engendrent les quatre images (Xiang)

le vieux yang ou grand yang (tai yang) correspond à la saison de l'été

 

le vieux yin ou grand yin (tai yin) correspond à la saison de l'hiver

le jeune yang ou petit yang (shao yang) correspond à la saison du printemps

le jeune yin ou petit yin (shao yin) correspond à la saison de l'automne

Les quatre images engendrent les huit trigrammes (Gua)

 

(Da Zhuan le grand commentaire chapitre XI § 5)

 

 

YI JING ET MEDECINE

 

Le maître dit : « Reconnaître les germes est assurément divin.
 L’homme noble ne flatte pas dans ses rapports
 avec les supérieurs, il n’est pas arrogant dans
 ses rapports avec les inférieurs. Il connaît assurément
 les germes. Les germes sont le premier,
 l’imperceptible commencement du mouvement,
 la première trace de fortune (ou d’infortune) 
qui se manifeste. L’homme noble voit les germes
 et agit aussitôt. Il n’attend pas le jour entier." 
(Da Zhuan, le grand commentaire chapitre IV § 11)

 

A. Cheng met en évidence dans son chapitre consacré à « l’infime amorce », l’importance donnée aux germes des événements. Dans le Yi Jing, Kong Fu Zi (Confucius) insiste sur le terme Ji signifiant annonce d’un changement, ce terme est très proche de Yi du Yi Jing qui se traduit par mutations. Le Yi Jing permet par la pratique divinatoire d’entrer en contact avec le « sans- forme », cette acuité permet de discerner les germes des actions ou des événements futurs.

 

C’est ce que cherche le médecin chinois, il scrute à travers les signes les plus tenus, les plus petits les germes d’un trouble ou d’une maladie avant qu’elle ne soit installée. Agir avant que le mal ne s’installe, savoir reconnaître les germes de la maladie tels sont les préoccupations du médecin chinois, en cela il se rapproche du sage.

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SOURCES :

Caractères chinois Wieger

Dictionnaire français de langue chinoise Ricci

Histoire de la pensée chinoise A. Cheng

La pensée chinoise M.Granet

Les signes et les mutations Wang Dongliang

Le Yi king traduit par Philastre

Yi King R.Wilhem

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Rédigé par Thierry Lambert

Publié dans #Histoire et tradition

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Publié le 10 Août 2023

Voici une historiette amusante appartenant au Lie Zi (Lie-tzeu ou Lie-tseu) au chapitre 5 du « vrai classique du vide parfait », nous y trouvons une intéressante allusion aux liaisons entre les organes et les sens.

« L’empereur Mou[1] des
 Tcheou étant allé chasser
 à l’ouest,
franchit les monts
 K’ounn‑lunn,
 alla jusqu’à Yen­chan,
 puis revint vers la Chine.
 Sur le chemin du retour, on lui présenta
 un artiste nommé Yen-cheu.

— Que sais-tu faire ? lui demanda l’empereur.
— Que Votre Majesté daigne me permettre de le montrer, dit l’artiste.
— Je te donnerai un jour, dit l’empereur.



Quand le jour fut venu, Yen-cheu se présenta devant l’empereur,
 avec une escorte.

— Qui sont ceux-ci ? demanda l’empereur.
— Ce sont mes créatures, dit Yen-cheu ; elles savent jouer la comédie.

L’empereur les regarda stupéfait. Les automates de Yen-cheu
 marchaient, levaient et baissaient la tête,
 se mouvaient comme des hommes véritables
. Quand on les touchait au menton,
 ils chantaient, et fort juste.
 Quand on leur prenait la main,
 ils dansaient, en cadence. Ils faisaient tout
 ce qu’on peut imaginer.

L’empereur décida de les donner en spectacle
 à son harem. Mais voici que, tout en jouant
 la comédie, les automates tirent des œillades
 aux dames. Furieux, l’empereur allait faire
 mettre Yen-cheu à mort,
 croyant qu’il avait frauduleusement
 introduit des hommes véritables.

Alors celui-ci ouvrit ses automates, et montra à l’empereur
 qu’ils étaient faits de cuir et de bois peint et verni.
 Cependant tous les viscères étaient formés, 
et Yen-cheu démontra à l’empereur, que, 
(conformément à la physiologie chinoise), 
quand on enlevait à un automate son cœur,
 sa bouche devenait muette ; quand on lui enlevait le foie,
 ses yeux ne voyaient plus ; quand on lui enlevait les reins,
 ses pieds ne pouvaient plus se mouvoir.


— C’est merveilleux, dit l’empereur calmé ; tu es presque
 aussi habile que le Principe auteur de toutes choses ;
Et il ordonna de charger les automates sur un fourgon,
 pour les rapporter à sa capitale.

Depuis lors on n’a plus rien vu de semblable. Les disciples
 de Pan-chou l’inventeur de la fameuse tour d’approche
 employée dans les sièges, et de Mei-ti le philosophe
 inventeur du faucon automatique, pressèrent vainement
 ces deux maîtres de refaire ce que Yen-cheu avait fait.
 Ils n’osèrent même pas essayer (la force de volonté
 capable de produire la continuité efficace leur manquant).»

 

 

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Sources :

Les pères du système taoïste L.Wieger Cathasia

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[1] Le roi Mu ou Muwang 5ème empereur de la dynastie des Zhou (-1121, -256), il régna de -1001 à -946

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Remarque :

La traduction de Wieger utilise la transcription de l’école française d’Extrême-Orient et non le pinyin, ce qui explique ces différences de transcription du chinois dans notre langue.

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Rédigé par Thierry Lambert

Publié dans #Histoire et tradition

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Publié le 7 Août 2023

APPRENDRE A ECOUTER ; VIDER SON COEUR

Pour cela, le praticien de shiatsu se place dans une disposition intérieure particulière appelée « écoute du cœur » ou « écoute du Shen (1) ; pour ce faire il s’y exerce en appliquant simplement ces deux points :

S’asseoir confortablement en fermant
 les yeux (fermer les yeux favorise
 l’introspection)
 
 « écouter » en direction de la zone
 du cœur, concentrer toute son  attention
 vers la zone du cœur. On parle ici 
d’une pensée chargée d’intention (le Yi)
Etymologique l’idéogramme Yi

Yi se compose de

Yin

signifiant son, bruit, son de la voix, paroles, son musical

Et de Xin

signifiant cœur

 

         Yi porte donc dans sa graphie le sens de : « son du cœur » ou « voix du cœur »

        Cet exercice a une grande importance étant donné qu’il prépare à la rencontre du praticien de shiatsu et de son patient. Le thérapeute se met dans cette disposition intérieure afin d’être à l’écoute. Mais pourquoi écouter son propre cœur afin de s’ouvrir à l’autre ? Voici quelques réponses à cette question à travers des extraits d’un texte anonyme qui m’avait été communiqué à l’occasion de ma formation en shiatsu, malheureusement la personne avait omis de nous livrer l’auteur de ces lignes très intéressantes. Le texte s’intitule : « écoute du cœur et rencontre thérapeutique »

 

« Dans la Chine ancienne, la qualité première
 du médecin est d’être ;
 Xu Xin, cœur vide – cœur disponible »
 
« Ici le thérapeute ne cherche pas à tout prix
 à saisir des symptômes, à établir un diagnostic
dans les meilleurs délais, à justifier son 
intervention en intervenant le plus vite
possible selon un savoir, une technique… »
 
« Elle est une simple ouverture à ce qui apparaît
 quel que soit sa faiblesse ou son instabilité »
 
« Dans l’écoute du cœur, il y a témoignage 
de la rencontre entre deux êtres à travers
 des imperfections mutuelles, en différant
 l’irruption des jugements ou en s’en distanciant
 autant que possible »

 

          D’après l’auteur de ce texte, ce qui apparaît tout d’abord à la conscience du thérapeute ce sont ses propres limitations, imperfections ou problèmes ; ceux-ci s’atténuent peu à peu étant donné que le thérapeute est lui aussi en chemin de sa propre guérison ; ils laissent ensuite la place à la possibilité d’une écoute véritable de l’autre. Le cœur est au centre de cette rencontre, il se vide de ses propres préoccupations afin de pouvoir être à l’écoute. Ces lignes semblent s’inspirer du plus connu des penseurs taoïstes Lao Zi qui dans le Dao De Jing, par quelques simples images nous fait appréhender la supériorité du vide.


 


















Chapitre XI Dao De Jing (extrait)
 
« Trente rayons convergent au moyeu
Mais c’est le vide médian qui
Confère à la voiture sa fonction
On façonne l’argile pour faire des vases,
Mais c’est du vide interne
Que dépend son usage.
Une maison est percée de portes et de fenêtres
C’est encore le vide qui
Permet l’usage de la maison.
Ainsi « ce qui est » constitue
La possibilité de toute chose
«Ce qui n’est pas »
Constitue sa fonction » (2) Lao Zi
 
C.Larre et E.Rochat de la Vallée tous deux
 spécialistes de médecine chinoise nous
 livrent leurs réflexions sur ce même sujet (3)
 
« Le cœur est vide quand il est capable
 de tout recevoir, accepter, considérer, 
parce qu’il n’est pas fixé, arrêté sur
une idée, un désir. Ne rien exclure de
ce qui existe permet de ne pas s’émouvoir
 exagérément et de réagir juste »
 
         Ce texte apporte une autre facette de Xu Xin, non seulement le cœur est vide
de nos jugements ou de nos propres problèmes comme on l’a vu précédemment
mais aussi il n’est pas arrêté sur une idée ou un concept, il est en mouvement.

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[1] Principe vital supérieur, quintessence de l’énergie vitale, âme supérieure (Ricci 4317)

[2] P 13 Philosophes taoïstes Gallimard

[3] P81 Les mouvements du cœur C.Larre E.Rochat de la Vallée

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Extrait de Posture et Shiatsu mémoire par T.Lambert au cours de sa formation auprès de l'ARTEC

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Rédigé par Thierry Lambert

Publié dans #Histoire et tradition

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